flowhynot-i-am-illustrailer-florent-beaufils-1-mois-plus-tard-thumbnail

Article: 1 mois plus tard.

flowhynot-i-am-illustrailer-florent-beaufils-1-mois-plus-tard-1

photos : Flowhynot & Yann Alarcon

Le lundi 16 mars 2020, aux environs de 20h, le destin de la France a changé. Nous sommes entrés dans un mode de vie inédit et jamais vu : le confinement.

Un évènement qui a boulversé nos vies, celle du monde entier, et qui risque d’avoir beaucoup d’impact dans le futur.

Durant ces 8 semaines où nous avons été ‘assignés à résidence’, j’ai pour ma part essayé de continuer à avancer malgré tout.

Que ce soit du point de vue professionnel, ou j’ai réalisé la nouvelle mouture de mon site mettant plus en avant mon univers créatif et ma passion pour le sport. 2 composantes que je souhaite absolument regrouper à court terme pour évoluer exclusivement dans un secteur qui épouse ma personnalité. L’âge me poussant de plus en plus à faire des choix de ‘sens’.

J’ai continué avec mes associés de faire avancer le projet Bridgers, un collectif de jeunes entrepreneurs souhaitant offrir des solutions complètes en terme de communication digitale.

Et j’ai aussi pris plaisir à illustrer notre situation et nos pensées de coureur sous l’angle de l’humour avec le magazine Distances + au travers d’un série intitulée ‘Le clin d’oeil de Flowhynot’.

🖌À voir aussi : le clin d’oeil de Flowhynot, une série d’illustrations pour Distances + sur la vie des coureurs durant le confinement

Du côté sportif, j’ai compris le choix de certains, même d’athlètes reconnus, de stopper leur entraînement.

En effet la saison 2020 s’en retrouve très largement tronquée. De mon côté j’avais prévu un programme quadrillé et diverses courses, dont le MIUT, pour pouvoir me préparer sereinement à fouler les 166 kilomètres de sentiers et 10 000 mètres de dénivelé de la Diagonale des Fous en octobre. Tout ça est tombé à l’eau, et ma préparation sera à revoir.

Mais je me suis rangé du côté de ceux qui ont souhaité continuer à suivre un entraînement assez volumineux avec les moyens du bord. Je dois avouer que mon arrivée récente dans la discipline m’a peut être effrayé. Je manque sans doute encore d’expérience, de repères. J’ai surement eu une appréhension face à un arrêt aussi brut après seulement 1 an et demi de pratique.

Alors j’ai profité de notre heure autorisée pour ‘préserver‘ ma foulée tant bien que mal. J’ai fait pas mal de PPG, notamment dans mes escaliers. Et comme bon nombre d’entre nous je suis devenu ‘cycliste‘ d’appartement en cumulant plus de 1000 kilomètres sur mon home trainer.

Cette période m’a fait prendre conscience de beaucoup de choses. Notamment que le temps est un élément rare mais peut être le plus important dans notre vie. Nous n’en avons qu’une. Alors ce n’est pas évident. Aujourd’hui ça n’est pas le cas. Mais je me suis promis de plus prendre le temps de vivre dans les prochains mois, et de profiter de ma famille, de la nature et de la vie tout simplement. Un défi aussi compliqué qu’un ultra à l’heure d’une société qui n’a cessé de le ‘compresser’ ces dernières décennies.

flowhynot-i-am-illustrailer-florent-beaufils-1-mois-plus-tard-3

photo : Flowhynot

Le 11 mai jour de ‘libération‘

1 mois après notre déconfinement je suis heureux de retrouver les sentiers, mon GR34, mon vélo et de pouvoir à nouveau parler, tout du moins ‘murmurer‘, d’objectifs.

Pour cela je m’appuie sur les conseils de mon entraîneur Diego Alarcon, qui m’accompagne depuis le début de l’année en vue du Grand Raid et en qui je voue une solide confiance.

Étant donné son rôle d’acteur reconnu au plus proche du monde du trail, je trouvai intéressant de savoir comment il a vécu cette période. D’avoir son ressenti sur ce qu’il a perçu de notre communauté, nous les pratiquants de ce sport. Et comment il analyse le futur de la discipline.

 

Salut Diego, même si je te connais bien, peux-tu te présenter, ainsi que Fartleck, en quelques mots ?

D.A. Salut Flo, tout d’abord merci pour cet interview. Alors tout simplement, Diego 30 ans. Je suis entraineur et vis à Valmorel en Savoie depuis toujours. Depuis quasiment 3 ans je collabore avec Christophe Malarde sous l’entité Fartleck, une entreprise de coaching sportif ou plutôt d’accompagnement. Que ce soit pour un objectif de course, une saison, un OFF ou tout simplement remettre les chaussures pour être en bonne santé.

Quel est votre leitmotiv à toi et Christophe à travers votre activité ?

D.A. ‘Rendre l’extraordinaire accessible‘ ! Cette phrase m’a toujours plu, car elle s’adresse à tous. Elite, coureur plaisir, coureur ultra, skyrunner, randonneur, etc. Que ce soit l’objectif d’un dossard ou d’un projet OFF, on a tous un ‘projet extraordinaire‘ lorsque l’on pratique la course à pied en nature. Notre volonté est d’accompagner au mieux celles et ceux qui nous font confiance pour faire un bout de chemin ensemble.

Il y a un mois nous avons vécu un moment tristement «historique » en étant confiné 8 semaines. Comment as-tu vécu cela à titre personnel ?

D.A. Oui effectivement, ça a été une période compliquée. Pour ma part j’étais confiné en montagne et en famille. J’ai fait en sorte de vivre cette période le plus ‘sereinement‘ possible.

“Trouver le juste milieu n’a pas toujours été facile.

flowhynot-i-am-illustrailer-florent-beaufils-1-mois-plus-tard-4

photo : Cyrille Quintard

Et en tant que coach quel regard as-tu eu ?

D.A. J’ai dû prendre beaucoup de recul concernant les annulations de courses et les inquiétudes de tous les athlètes qui en découlaient. Relativiser m’a paru essentiel en vue de la situation. Tout en étant conscient qu’il me fallait rentrer dans une nouvelle dynamique pour accompagner tout à chacun dans leur pratique.

Comme tu viens de le préciser les athlètes que tu gères se sont vus à la fois amputés d’une grande partie de leurs objectifs, et «privés » de leur habitude d’entraînement. Avec du recul, quelle analyse générale fais-tu de leur comportement et des conséquences sur leur motivation ?

D.A. Déjà il a fallu que tous se recréent une routine, sans même parler de sport (télétravail, enfants à la maison, etc). Certains ont voulu tout stopper. Personnellement je n’ai eu aucun mal à entendre un athlète me dire qu’il arrêtait temporairement. Au contraire, si il voulait profiter de ce moment pour faire autre chose, passer du temps en famille, c’était tout à fait compréhensible. Les échéances étant reportées ou simplement annulées, il n’y avait aucune raison d’être la femme ou l’homme la ou le plus affuté.e. 😉

D’autres, au contraire, n’ont jamais fait autant de sport. En s’entraînant deux fois par jour, en faisant du renforcement de façon excessive. Et finalement en ressortant du confinement avec beaucoup de fatigue.

Il fallait essayer de garder leur motivation intacte tout en régulant leur pratique à la maison. Donc, trouver le juste milieu n’a pas toujours été facile.

Quelle a été ta réaction pour adapter tout le travail qui était en cours et garder un cap afin que tes coureurs restent à minima concernés ?

D.A. Avec Christophe, nous avons recréé des séances de courses à pied ou home trainer, et proposé de nouvelles séances de renforcement musculaire dans un esprit ludique. Tout ça en prenant en compte les restrictions, chose qui était essentielle. Nous avons, en ce sens, alimenté la chaine Youtube Fartleck avec les vidéos ‘Run & Talk‘ avec l’idée de proposer du contenu autant à nos athlètes qu’à tout public. Enfin, sur la fin du confinement, nous avons décidé de proposer un défi en interne. Un challenge amical par équipe réparti sur deux week end. Nous avons été surpris du nombre de participants et de l’engouement. La motivation a été au rendez vous, et ce fut un très bon moment de partage, de dépassement de soi et surtout une super parenthèse.

Comme tu le sais la course à pied était autorisée dans un certain cadre. Mais la communauté de coureurs a aussi été très mal vue, parfois qualifiée d’inconsciente. Quelle est ta réaction face à cela ?

D.A. Je ne veux pas trop entrer dans les polémiques. Respecter les consignes était la priorité à mon sens. Après c’est sûr qu’entre moi qui croisait quelques vaches lors de mes footing où celui qui vit à Paris, il y avait un fossé énorme. La chose primordiale était d’être responsable dans sa pratique malgré le manque de liberté que nous avons tous ressenti.

On a aussi vu plein d’initiatives ou de défis en tout genre. Quelle est ton analyse par rapport à ce besoin de faire des choses, de se définir tout de même des objectifs ? Buzz ou réèl intérêt ?

D.A. J’ai trouvé qu’il y avait des initiatives intéressantes comme des cours de cuisine en direct, des séances de sport proposées sur internet, des conférences gratuites sur divers sujets, etc. J’ai perçu de la solidarité. Du point du vue sportif, beaucoup en ont profité pour pratiquer, pour se ‘bouger‘. J’espère qu’ils continueront sur cette lancée. Cependant, je n’ai pas toujours été convaincu par certains défis plutôt portés sur le buzz

31 jours après le déconfinement, comment sens-tu tes athlètes de façon générale ?

D.A. Je les sens plutôt bien. En sortie de confinement j’ai fait le point avec chacun pour voir comment avancer sur la suite de la saison. Chaque athlète est revenu vers moi avec différents projets de course ou OFF. Nous avons donc pu redéfinir au mieux la suite de cette saison particulière. Elle comporte finalement peu de compétitions mais remet, selon moi, du sens à la pratique du trail.

Cette crise va avoir beaucoup d’impacts dans les prochains mois, prochaines années. Sur le plan purement sportif quels vont-il être selon toi ?

D.A. En effet nous allons tous être touchés, quels que soient les secteurs, par une récession économique importante. Le monde du sport ne va pas passer au travers et sera durement impacté tant au niveau des athlètes, que des clubs, des associations, des organisateurs d’événements et de tous les partenaires. Difficile cependant de me prononcer sur les impacts réels des mois/années à venir.

“C’est un retour à l’essentiel.

flowhynot-i-am-illustrailer-florent-beaufils-1-mois-plus-tard-5

photo : Florent Vorger

Comment imagines-tu les prochaines épreuves?

D.A. Les prochaines épreuves, je les imagine avec une bande de potes, une carte IGN et quelques beaux sommets pour profiter de belles journées dehors.

Comment vas-tu y préparer tes athlètes dans cette saison « étrange » amputée de toute la première partie de saison qui sert aussi de préparation pour les grosses échéances de l’été et de la rentrée ?

D.A. Il faut redéfinir sa pratique, qui a souvent tendance à graviter essentiellement autour de la compétition et des dossards. Finalement, c’est un retour à l’essentiel qui servira, j’en suis sûr, dans la réussite des prochains objectifs.

D’ailleurs penses-tu que l’avenir du trail va continuer à être dans les courses et les dossards ?

D.A. Je ne sais pas. Je crois que la question qu’il faut se poser c’est ‘comment je veux faire évoluer ma pratique en trail running ?

En tant qu’acteur du Trail et du monde de l’outdoor, si tu avais un conseil à donner aux coureurs et sportifs ça serait lequel ?

D.A. Un peu comme ma réponse précédente, je crois qu’avant tout il faut se poser cette question ‘pourquoi je cours ?Une fois qu’on a répondu à cette question, chaque aventure, chaque kilomètre, chaque sommet prend tout son sens.